Le grand songe angoissé de «La Bête»

La séquence d’ouverture ne laisse pas de doute, il s’agira
d’un jeu. Ce qui ne signifie évidemment pas que ce ne sera pas sérieux. Plutôt
qu’il y aura des règles, qui peuvent être arbitraires, et de l’espace pour
évoluer, inventer.
La séquence d’ouverture ne laisse pas de doute, il s’agit
d’elle. Elle une actrice qui, sur fond vert pour effets spéciaux numériques,
interprète une scène selon les consignes du réalisateur, off. Elle, cette
actrice, de film en film différente et toujours formidable de présence, de
finesse, de musicalité: Léa Seydoux. Et aussi –mais, ça ce sont les
séquences suivantes qui le diront– elle, Gabrielle.
Gabrielle est pianiste, épouse d’un riche industriel, à
Paris en 1910. Gabrielle est une jeune femme malheureuse dans le monde aseptisé sous l’empire de l’intelligence artificielle (IA) en 2044. Gabrielle est une Française qui essaie de devenir actrice à Los Angeles en 2014 et qui gagne sa vie en gardant une villa hyper moderne.
Il y a trois récits, donc, mais il y a une seule histoire.
Par scènes simples et belles, le film construit pas à pas que la Gabrielle du
futur revit deux époques d’un passé qui la hante, «pour s’en purifier» a
réclamé la voix non-humaine qui dit comment les choses doivent être.
Dans chaque époque, Gabrielle retrouve le même homme. Chaque
fois s’ébauche, très différemment, une histoire d’amour. Le film circule entre
les époques,…