Grenoble : des échauffourées avec la police et une bibliothèque incendiée
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Grenoble (AFP) - "Ecoeurés": des habitants regardent dépités mercredi la façade détruite de la bibliothèque dans le quartier Mistral de Grenoble, incendiée dans la nuit par une voiture-bélier, après des violences urbaines dans ce quartier populaire.
L'incendie est survenue peu après minuit, dans ce quartier classé prioritaire du sud-ouest de la capitale iséroise.
Dès 20H00, des équipages de police (Brigades spécialisées de terrain, BST) et des CRS avaient subi des jets de projectiles, sans être atteints, a indiqué une source policière.
Les jets se sont poursuivis dans la soirée, ainsi que des tirs de mortiers, qui n'ont fait ni blessé ni dégradation.
Dans le même temps, entre 20H00 et 21H00, deux interpellations ont eu lieu dans le quartier: un jeune homme pour détention de stupéfiants par la BST puis un trentenaire par les CRS.
Puis, peu après minuit et non loin de là, une voiture est lancée contre la bibliothèque puis incendiée.Les circonstances de ces derniers faits n'ont pas été précisés à ce stade.
- Dégâts "colossaux" -
Mercredi matin, des équipes spécialisées examinaient la structure en partie brûlée de la bibliothèque Chantal-Mauduit, inaugurée récemment, a constaté l'AFP.
La carcasse de la voiture totalement calcinée, encastrée dans les restes de la façade, a été lancée volontairement dans l'entrée, selon le récit d'une source policière.Le véhicule a été enlevé des lieux en milieu de matinée.
"Le bâtiment est entièrement inutilisable, les dégâts sont colossaux", n'a pu que constater sur place Lucille Lheureux, adjointe au maire.
"Nous sommes à la fois écœurés, touchés, affectés par cet acte, mais nous sommes aussi déterminés à faire vivre ce service public", a-t-elle déclaré à la presse.
L'élue a condamné "fermement cet acte d'une violence inouïe" qui vient cibler "un équipement qui est au bénéfice de familles, d'enfants, tout au long de la journée".
Un groupe de trois jeunes mères regardaient les pompiers travailler depuis le trottoir d'en face: "On est attristées et dégoûtées.Nos enfants sont scolarisés là, ils y vont tous les jours.Il y avait aussi de l'escalade et du taekwondo, des ordinateurs en libre accès".
"Quand j'ai vu ça, j'ai pleuré, ça me dégoûte pour les gosses.Nos enfants ont des activités scolaires ici.La bibliothèque venait d'être rénovée", déplore Tatiana, l'une des trois femmes."Il va falloir se rabattre sur d'autres structures.Du coup il n'y a plus rien dans le quartier", regrette aussi Lexou, qui l'accompagne.
- Inaugurée en décembre -
La bibliothèque avait été inaugurée en décembre, sur un site qui accueillait précédemment un lieu de "culture populaire", fermé en 2023.
L'espace permet de profiter d'une grande bibliothèque mais aussi d'un mur d'escalade et d'un dojo.Une salle d'activités collectives de médiation culturelle a également été créée.
Un groupe de trois collégiens de 6e du collège Aimé-Césaire, à proximité, commentait avec animation mercredi devant les barrières de sécurité.
Rayan faisait de la lutte dans le bâtiment brûlé."Avant il y avait des problèmes ici et du coup ils ont fait une bibliothèque.On ne reconnaît plus, ici c'était l'accueil", dit-il.Ils se disent "un peu tristes" que le lieu soit détruit.
Les équipes en intervention mercredi matin sont en train d'effectuer "le diagnostic de ce bâtiment" pour estimer si et comment la structure doit être sécurisée, a expliqué Lucille Lheureux, saluant au passage les pompiers qui ont eu le réflexe "de mettre de côté le plus possible de collections".
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau s'était rendu à Grenoble vendredi sur le thème de la sécurité, une visite qui, hasard du calendrier, est intervenue au lendemain d'une attaque à la grenade dans un bar associatif.
L'incident, qui a fait une douzaine de blessés, avait relancé le débat autour de la sécurité à Grenoble, où les fusillades liées au trafic de drogue sont régulières.