logo AFP France

Narcotrafic: l'Assemblée approuve la création d'un nouveau régime carcéral

Narcotrafic: l'Assemblée approuve la création d'un nouveau régime carcéral
Publié le , mis à jour le

Paris (AFP) - Les députés ont approuvé mercredi dans l'hémicycle l'une des mesures les plus décriées du texte visant à lutter contre le narcotrafic, qui prévoit la création d'un nouveau régime carcéral d'isolement pour les plus gros trafiquants.

Portée par le ministre de la Justice Gérald Darmanin, et adoptée avec les voix du camp gouvernemental, de l'alliance RN-ciottistes et des indépendants de Liot, la mesure est inspirée du modèle italien de lutte contre la mafia.

La députée PS Colette Capdevielle a au contraire relayé les craintes de l'Association française des magistrats instructeurs, inquiète d'une concentration au même endroit de délinquants disposant de "moyens financiers quasi illimités pour organiser des évasions".

Le texte prévoit de créer des quartiers de haute sécurité, dans lesquels seraient affectées les personnes issues de la criminalité organisée les plus dangereuses, sur décision du garde des Sceaux, et après avis du juge de l'application des peines pour une personne condamnée.Un magistrat instructeur pourra aussi s'y opposer pour une personne prévenue.

Initialement fixée à quatre ans renouvelable, la durée d'affectation à ces quartiers a été ramenée à deux ans renouvelable, par amendements, après avis du Conseil d'Etat.

M. Darmanin s'était engagé à saisir la juridiction, qui a recommandé plusieurs aménagements pour remédier aux "risques d'inconstitutionnalité et d'inconventionnalité".

Sur ses suggestions, les députés ont aussi adopté un amendement pour mieux cibler les personnes susceptibles d'être affectées dans ces quartiers, visant celles pour qui il est jugé nécessaire de "rompre le lien avec les réseaux de la criminalité et de la délinquance organisées".

"Cela concerne entre 600 et 900 personnes", a affirmé M. Darmanin.

Le régime est particulièrement "difficile", de l'aveu même de M. Darmanin, et prévoit des fouilles intégrales systématiques en cas de contact physique sans surveillance constante d'un agent.Les administrations auront toutefois une latitude pour adapter le principe, par exemple en fonction de l'âge ou de la santé du détenu.

- "Dignité humaine" -

Le texte prévoit aussi le recours à des parloirs hygiaphones ou encore une interdiction d'accès aux unités de vie familiale et parloirs familiaux.

Les visites doivent se dérouler dans un parloir avec "dispositif de séparation", sauf exceptions comme les visites d'enfants mineurs de 16 ans (entre 16 et 18 ans l'administration pourra choisir de l'imposer).Une restriction de l'accès au téléphone est également prévue.

Des amendements ont exclu les entretiens avec les avocats du champ de ces deux restrictions.Mais une proposition du président macroniste de la commission des Lois Florent Boudié a été critiquée à gauche. 

Elle prévoit que le détenu ou l'avocat puissent demander un parloir avec séparation.Ceci dans l'idée d'éviter au détenu une fouille intégrale après l'entretien, selon M. Boudié.Mais cela fait peser une "suspicion" sur les "avocats", a critiqué Eléonore Caroit, membre du même groupe.

L'Assemblée a aussi exclu du nouveau régime carcéral les détenus bénéficiant ou obtenant le statut de repenti en collaborant avec la justice."Si vous parlez, vous ne serez pas dans ce régime de détention très stricte", a assumé Gérald Darmanin, soutenant la mesure.

"Est-ce qu'on va placer des personnes suspectes dans ces régimes afin d'obtenir des aveux?", a pointé Arthur Delaporte (PS).

Plus généralement la gauche, et l'ex-président macroniste de la commission des Lois Sacha Houlié (désormais député non-inscrit), se sont élevés contre un régime rappelant par trop les "quartiers de haute sécurité" abandonnés en 1982 par le ministre de la Justice de l'époque, Robert Badinter.

Pouria Amirshahi (écologiste) a fustigé un régime qui "contrevient à tous les principes essentiels de la dignité humaine".

Les débats sur ce texte issu du Sénat se poursuivront jeudi à l'Assemblée.

Publicité

Accessibilité : partiellement conforme