Pédocriminalité: Joël Le Scouarnec confronté mardi à ses journaux intimes

Vannes (AFP) - Joël Le Scouarnec va-t-il en finir avec le "mensonge"?L'interrogatoire très attendu de l'ex-chirurgien, jugé à Vannes pour des viols ou agressions sexuelles sur près de 300 patients, se poursuit mardi avec l'examen des carnets où il consignait ses actes pédocriminels.
Lundi, au lancement de la deuxième semaine du procès, Joël Le Scouarnec a assuré vouloir désormais "assumer" au moment où la cour criminelle du Morbihan terminait l'examen de sa personnalité.
"J'ai menti à tout le monde, (...) j'ai menti jusqu'en 2017, aujourd'hui, je veux assumer ma responsabilité", a-t-il déclaré dans le box, d'une voix toujours égale.
"Si j'ai commis un viol, je dirais j'ai commis un viol", a-t-il poursuivi, disant s'être "débarrassé" de son désir pour les enfants depuis 2017 et son incarcération.
Si l'accusé a reconnu durant l'enquête une partie des faits de viols (touchers rectaux) sur des garçons, il n'a reconnu que des agressions sexuelles sur des filles, a relevé plus tôt à la barre le gendarme qui a dirigé l'enquête.
Interrogé sur ses écrits faisant état de viols de petites filles dans ses carnets, le médecin a expliqué "qu'il s'agissait soit d'une exagération de sa part, soit d'un fantasme", a dit l'officier.
Pour l'un des avocats de la défense, Me Thibaut Kurzawa, l'accusé "est quelqu'un qui a avancé, qui a mis des mots sur ses actes, qui a une position qui a fortement évolué".
Depuis le début du procès, le 24 février, l'ex-chirurgien de 74 ans a adopté une attitude contrite, se confondant en excuses, lors de courtes prises de parole après les témoignages de ses proches.L'un des moments marquants de la première semaine d'audience a été la reconnaissance par l'accusé "d'abus sexuels" sur sa petite-fille face à son fils, père de la fillette.
Estimant avoir été un bon père, il a toujours nié le moindre geste sur ses trois fils mais reconnaît avoir fantasmé sur eux.
"Il y avait deux personnes: il y avait le pédophile et le père", se défend-il.
Cet adepte des listes (livres, opéras, films), doté selon son ex-épouse d'une "mémoire d'éléphant", affiche toutefois de troublants trous de mémoire, comme sur son enfance ou une éventuelle relation extraconjugale, mais aussi sur la disparition d'un carnet évoquant les faits commis en 1994.
Interrogé sur un éventuel traumatisme dans son enfance par la présidente, Aude Buresi, Joël Le Scouarnec affirme n'avoir "rien trouvé" dans son "passé" qui pourrait "expliquer (son) comportement" pédocriminel.
Pourquoi est-il ainsi?, insiste-t-elle."Je ne sais toujours pas apporter une réponse."
- "Mascarade" -
Lundi soir, Marie, une des victimes de l'ex-chirurgien, ne sait toujours pas si elle peut "avoir confiance en sa sincérité".
Me Francesca Satta, elle, a fustigé "cinq heures de mascarade"."Je ne crois pas à sa sincérité.Je pense qu'il est bien préparé", a-t-elle ajouté.
L'audience de mardi, qui débutera exceptionnellement à 9H00, doit permettre de décortiquer le parcours professionnel du médecin, puis de le confronter à ses journaux intimes.
Découverts en 2017 lors de son interpellation pour le viol d'une voisine de 6 ans, les carnets et fichiers dans lesquels il consignait les violences sexuelles commises durant des décennies avec les noms, âges voire les adresses des victimes, ont permis de découvrir l'ampleur de cette affaire.
Selon le directeur d'enquête, l'accusé a reconnu une grande partie des faits décrits dans ces carnets.
Des écrits qualifiés lundi par leur auteur de "sordides", "crus", "vulgaires"."Oralement, je ne me suis jamais exprimé ainsi, avilissante pour les personnes concernées, avilissante pour moi aussi", a-t-il assuré.
A l'époque, a dit l'ex-chirurgien, il n'avait "aucun état d'âme" pour les victimes, âgées en moyenne de 11 ans.
"Il se montrait fier de ses penchants, il aimait marquer qu'il était pédophile", a souligné le directeur d'enquête.
"J'ai fait tellement de mal que j'ai du mal à le supporter", a avoué l'accusé.
Le procès doit durer jusqu'à début juin, selon le calendrier transmis par la cour.
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