Allemagne : les conservateurs remportent les élections, record pour l'extrême droite
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Berlin (AFP) - Les conservateurs de Friedrich Merz ont nettement remporté les élections législatives dimanche en Allemagne, marquées aussi par une progression inédite de l'extrême droite dans la première puissance européenne mise au défi de se relancer, selon les sondages à la sortie des urnes.
Ce coup de barre à droite intervient à un moment charnière pour l'Allemagne, abasourdie par les annonces fracassantes de l'administration de Donald Trump sur la guerre en Ukraine, les craintes de rupture du lien transatlantique et les menaces de hausse des droits de douane.
Donnés gagnants depuis plusieurs mois, les conservateurs de la CDU et leur allié bavarois CSU sont crédités d'un score autour de 29% dans ces sondages effectués à la sortie des urnes et diffusés par les télévisions publiques ARD et ADF.
L'Alternative pour l'Allemagne (AfD) pointe en deuxième position en obtenant 19,5 à 20%, soit le double d'il y a quatre ans et un score historique pour cette formation d'extrême droite née en 2013.
Sa cheffe de file, Alice Weidel, a salué le "résultat historique" de son parti."Nous n'avons jamais été aussi forts au niveau national", a-t-elle déclaré.
Le camp conservateur exclut toutefois toute une alliance avec l'AfD malgré un "flirt" parlementaire sur les questions d'immigration et de sécurité durant la campagne électorale.
Le chancelier sortant Olaf Scholz n'a pas su convaincre les nombreux indécis de soutenir son parti social-démocrate (SPD), qui récolte seulement entre 16% et 16,5%.
C'est une débâcle sans précédent pour le plus vieux parti d'Allemagne depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale.
Autre perdant de ce scrutin, les Verts, alliés au gouvernement Scholz, dans une fourchette de 12-13,5 %.
- Attentats -
La campagne électorale, après l'implosion en novembre de coalition au pouvoir, s'est déroulée dans un climat intérieur pesant après plusieurs attaques meurtrières impliquant des étrangers ces dernières semaines, qui ont ébranlé l'opinion et favorisé les mouvements de droite et d'extrême droite.
Le dernier a eu lieu vendredi soir.Un jeune réfugié syrien est soupçonné d'avoir grièvement blessé un touriste à coups de couteau dans le Mémorial de l'Holocauste à Berlin.Il voulait "tuer des Juifs", selon la justice.
Brève et intense, la campagne a aussi été mouvementée, marquée par le retournement d'alliance des Etats-Unis vis-à-vis des partis centristes en Allemagne, alliée historique de Washington.
L'AfD a bénéficié du soutien appuyé pendant des semaines de l'entourage de Donald Trump: son conseiller Elon Musk, homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir Alice Weidel sur sa plateforme X.
Les législatives anticipées, suite à la rupture en novembre du gouvernement d'Olaf Scholz, se tiennent en outre la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, vécue comme un choc en Allemagne.
Le conflit a mis fin à son approvisionnement en gaz russe bon marché, et favorisé sa glissade dans la récession, et le pays a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens.
La perspective d'une paix réglée "dans le dos" de Kiev et des Européens inquiète tout autant.
- Gouvernement à Pâques?-
Dans ce contexte, la formation la plus rapide possible d'un exécutif en Allemagne est ardemment souhaitée par ses partenaires européens.
Friedrich Merz, qui avait déclaré viser Pâques, devrait se tourner vers le SPD.
Cette alliance baptisée "grande coalition" ou "Groko" entre les deux formations qui ont dominé le paysage politique de l'après-guerre, est aussi la coalition privilégiée par les Allemands, en mal de stabilité après les disputes incessantes du gouvernement tripartite d'Olaf Scholz avec les Verts et les libéraux du FDP.
M. Merz a dit à cet égard vouloir éviter un attelage à trois.
Les résultats de petits partis et leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5% des suffrages pour entrer au Bundestag pourraient à cet égard jouer un rôle important.
Selon les sondages à la sortie des urnes, le FDP flirte avec cette barre des 5%, tout comme BSW, nouvelle formation de gauche conservatrice, qui prône l'arrêt des livraisons d'armes à l'Ukraine.La gauche radicale Die Linke confirme sa remontada des dernières semaines (8,5 à 9%).