Offensif contre Trump, Carney assure que le Canada "gagnera"

Ottawa (AFP) - Le futur Premier ministre du Canada, Mark Carney, est monté au créneau dimanche contre Donald Trump, assurant dans un discours offensif que son pays "gagnera" et "ne fera jamais partie des Etats-Unis, de quelque façon que ce soit".
"Les Canadiens sont toujours prêts quand quelqu'un lance le gant.Que les Américains ne s'y trompent pas.Dans le commerce comme au hockey, le Canada gagnera", a-t-il lancé, en référence à la rivalité sportive des deux pays, instrumentalisée récemment par Donald Trump.
"Donald Trump attaque les familles, les travailleurs, les entreprises canadiennes, nous n'allons pas le laisser réussir", a promis Mark Carney, lors de son discours après avoir été triomphalement élu à la tête du parti libéral pour remplacer Justin Trudeau.
Le président américain a lancé une guerre commerciale avec son voisin en imposant des droits de douane sur des produits canadiens et ne cesse de dire qu'il souhaite que le Canada devienne le "51e Etat américain".
"Les Américains veulent nos ressources, notre eau, notre terre, notre pays", a-t-il mis en garde, "s'ils devaient réussir ils détruiraient notre façon de vivre"."Aux Etats-Unis (...), il n'y aura jamais de droit à la langue française", a-t-il dit dans son discours, passant régulièrement de l'anglais au français."La joie de vivre, la culture, et la langue française font partie de notre identité".
"Ce sont des jours sombres, des jours sombres provoqués par un pays (les États-Unis) auquel nous ne pouvons plus faire confiance", a-t-il poursuivi.
L'ancien banquier central de 59 ans, novice en politique, a promis de "bâtir une nouvelle économie et de créer de nouvelles relations commerciales".
Il deviendra officiellement Premier ministre dans les jours qui viennent après une passation de pouvoir avec Justin Trudeau, qui avait annoncé sa démission début janvier, après près de dix ans au pouvoir.
M. Carney pourrait cependant ne pas rester en poste très longtemps, puisque le Canada doit organiser des élections au plus tard en octobre.
- "Nouveau visage" -
Dans le centre des congrès de la capitale Ottawa, où de grands drapeaux canadiens ont été installés sous des spots rouges, la couleur du parti, les militants ont exulté à l'annonce des résultats.
Pour Sean Cruz, militant, ce vote est synonyme d'espoir "c'est un bon résultat.Nous avons besoin d'un nouveau visage au gouvernement et d'un nouveau visage au sein du parti".
Luzminda Longkines, toute de rouge vêtue, se réjouit d'avoir un parti fort face aux conservateurs qui affirment que le "pays est cassé"."Mais c'est faux et Donald Trump vient d'unir le pays, nous avons maintenant un ennemi commun!"
Dans son discours d'adieu, Justin Trudeau a lui aussi mis en garde le pays estimant que les attaques de Donald Trump représentaient un "défi existentiel"."La liberté n'est pas un acquis, même le Canada n'est pas un acquis", a-t-il lancé.
- Elections en ligne de mire -
Mark Carney, originaire de l'ouest canadien, devra rapidement rassembler son parti en vue des prochaines élections.
"Il est considéré comme le seul candidat qui donne aux libéraux une chance de remporter les prochaines élections", estime Cameron D. Anderson de l'Université Western Ontario.
Jusqu'ici les électeurs canadiens semblaient rejeter des libéraux usés et impopulaires et jugés responsables de la forte inflation, de la crise du logement et des services publics.Mais l'arrivée de Donald Trump a rebattu les cartes politiques.
Mark Carney, qui se définit comme un centriste, était jusqu'à tout récemment envoyé spécial des Nations Unies pour le financement de l'action climatique.
Économiste sorti à la fois de Harvard aux Etats-Unis et d'Oxford au Royaume-Uni, il a fait fortune en tant que banquier d'affaires chez Goldman Sachs avant de diriger la Banque du Canada puis la Banque d'Angleterre.
Selon un sondage de l'institut Angus Reid publié mercredi, M. Carney est le choix préféré des Canadiens pour affronter M. Trump, avec 43% des personnes interrogées qui le plébiscitent contre 34% pour le chef de file des conservateurs, Pierre Poilievre.
Ce dernier, qui avait le vent en poupe ces derniers mois, semble perdre du terrain dans ce nouveau contexte politique même si le parti conservateur reste légèrement en tête des intentions de vote.