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"C'est une purge": le désarroi de militaires transgenres bannis par Trump

"C'est une purge": le désarroi de militaires transgenres bannis par Trump
Publié le , mis à jour le

Reston (États-Unis) (AFP) - La colonelle Bree Fram n'avait jamais imaginé cette fin-là.Militaire depuis 22 ans, elle pensait quitter l'uniforme au moment choisi ou en tombant sur le front, mais pas à cause de ce qu'elle est: une femme transgenre.

Donald Trump n'a cessé de clouer au pilori les personnes trans pendant sa campagne.Une fois président, il a décidé ce que Bree Fram redoutait: leur interdire de servir dans l'armée.

"Quand c'est votre propre gouvernement qui vous oblige à enlever votre uniforme parce qu'il ne vous considère pas apte à servir le pays, ça brise le coeur", lance la colonelle de 45 ans, ses yeux gris humides.

"On a servi notre pays pendant une décennie comme personnes transgenres, sans tabou, de manière honorable et compétente, dans chaque domaine militaire, ici et dans le monde entier.Les arguments du gouvernement ne se fondent sur aucune preuve", ajoute-t-elle, soulignant parler en son nom propre.

Donald Trump a promis de mettre fin au "délire transgenre" qui selon lui ravage les Etats-Unis. 

Il a signé un décret jugeant les militaires trans inaptes à servir le pays, qui doit entrer en vigueur le 26 mars.

Des milliers de personnes trans seront mises à la porte.

"C'est une purge", dénonce celle qui a travaillé pendant 18 ans dans l'armée de l'air, avant d'intégrer une force spéciale chargée de la conduite des opérations militaires dans l'espace.

- "Pas des monstres" -

"La meilleure chose que nous puissions faire, c'est simplement être nous-mêmes et parler aux gens pour leur faire comprendre que nous ne sommes pas des monstres.Il n'y a pas de deuxième tête qui pousse sur mon épaule et fait de moi un épouvantail", souligne Bree Fram.

Pendant plus de 13 ans, elle a travaillé "derrière un bouclier", cachant sa transidentité.

Lorsque, pour la première fois dans l'histoire des Etats-Unis, Barack Obama permet en 2016 aux personnes trans de servir dans l'armée, Bree Fram est libérée.

Elle dit à tout le monde qu'elle est femme et non homme, ce qu'elle ressent depuis toute petite.

"Si vous n'êtes pas vous-mêmes, vous ne pouvez pas donner le meilleur de vous.Et le fait de pouvoir servir ouvertement comme personne trans a été magique, car d'un coup des milliers de personnes deviennent meilleures qu'elles ne l'étaient avant", sourit la colonelle, aux cheveux blonds mi-longs, depuis sa maison de Virginie, dans l'est des Etats-Unis.

- "Foudre" puis "ouragan" -

Drapeaux et médaillons bleu, rose et blanc, les couleurs des personnes transgenres, parsèment son bureau.

Ces dernières années, elle s'est battue pour les droits des personnes LGBT+ au sein de l'armée.Le premier mandat Trump, "c'était comme la foudre" qui s'abattait sur les militaires trans, sans que le républicain ne puisse pour autant les virer.

"Cette fois, c'est différent.C'est comme un ouragan qu'on voit venir de loin.Il n'y a aucune manière pour les personnes transgenres de continuer à servir", lâche Bree Fram.

Ryan Goodell travaille depuis 13 ans pour la Marine américaine.En 2018, il dévoile sa transidentité et démarre dans la foulée sa transition de genre.

"Je suis à bout", dit-il à l'aube de perdre son emploi."Un de mes mentors m'avait conseillé d'être toujours prêt à arrêter, parce qu'il y a une vie en dehors de la Marine, mais je n'y étais pas encore prêt", ajoute le militaire de 32 ans.

Bree Fram se dit "triste" pour son pays.

"On plante les graines d'un jardin qu'on ne verra peut-être jamais (fleurir) mais on fera tout pour l'arroser afin de laisser derrière nous un héritage important, un message d'ouverture d'esprit pour la prochaine génération."

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